Black book, c’est un peu le retour au pays. Après une vingtaine d’années passées au Etats-Unis, Paul Verhoeven revient aux Pays-Bas. Un peu moins de dix ans avant Elle, son dernier film en lice pour les Oscars, le réalisateur faisait donc son retour sur la scène européenne.
L’action se situe à La Haye en 1944. Rachel, jeune juive rescapée du massacre d’un groupe de coreligionnaires qui tentaient de fuir le pays, s’engage dans la Résistance. Son talent et sa beauté la font bientôt désigner pour séduire un capitaine du service de renseignement allemand, Ludwig Müntze, dans le but de délivrer le fils d’un des chefs de la Résistance, retenu en otage par les nazis…
Sulfureux, Verhoeven -rappelons qu’il est le réalisateur qui, de Basic Instinct, Showgirls (aujourd’hui réévalué) et Starship Troopers, a bousculé les codes moraux d’Hollywood – sulfureux, donc, il le sera toujours. Il l’est encore ici. Mais le spectacle, s’il est parfois dérangeant, s’il semble parfois peu vraisemblable, sert à éveiller la conscience du spectateur. Comme le déclarait Jacques Mandelbaum dans la critique qu’il avait rédigée dans Le Monde au moment de la sortie du film : « Black Book […] pose une question fondatrice de la modernité cinématographique : celle de la représentation de l’extermination et de la soudaine invalidité des canons du cinéma classique« . En ce sens, le film est puissamment moderne et, comme tous les films de Verhoeven, même ceux de sa période américaine, il ne peut être confiné à la seule catégorie du film de guerre ou du film d’action.
De ce chassé-croisé entre bien et mal qu’il maintient le film durant, Verhoeven tire, pour reprendre une dernière fois les mots de Jacques Mandelbaum, une « leçon d’humanité et d’inquiétude [qui] se situe dans le sillage des quelques rares chefs-d’oeuvre qui se sont dignement confrontés à cette histoire, Le Dictateur, de Chaplin, To Be or not to Be, de Lubitsch, ou Monsieur Klein, de Losey « .
On vous le dit : un chef d’oeuvre !